Conclave : une Église sous tensions


Dans deux jours, les cardinaux du monde entier entreront en conclave pour élire le successeur du pape François. Un moment intense, unique, scruté et un peu mystérieux, qui renvoie à une longue tradition et une mise en œuvre (voir le fonctionnement) héritées des siècles passés. Il s’agit d’un évènement que beaucoup regardent avec espérance, mais aussi avec inquiétude.

Car l’Église d’aujourd’hui, comme à bien des époques, est traversée de tensions profondes, parfois douloureuses. Et ces tensions ne resteront pas à la porte de la chapelle Sixtine, même si l’Église ne doute pas que l’élection du souverain Pontife est le résultat du choix de Dieu, l’Esprit Saint étant le maître.

Les tensions visibles dans l’Église à l’heure du conclave

L’Église est par nature universelle, catholique. Elle rassemble des cultures, des traditions, des sensibilités très différentes. Mais cette richesse peut aussi devenir source de tensions, voire de division.

D’un côté, une ligne dite « progressiste », souvent inspirée par le pape François, promeut une Église synodale, ouverte à l’écoute de tous, attentive aux réalités de terrain, à la souffrance humaine, aux enjeux de justice sociale, d’écologie intégrale et de paix. Elle appelle à une Église plus fraternelle, moins centralisée, plus engagée dans le dialogue. L’Église est perçue plutôt comme une maison ouverte ou une tente largement étendue (cf. Is 54, 2).

De l’autre, une ligne plus « conservatrice », qui exprime une crainte : celle d’une dilution de la foi et de la morale, d’un effacement des repères doctrinaux, d’une perte d’autorité de l’Église. Certains redoutent une forme de « protestantisation », avec moins de hiérarchie, plus de subjectivité, voire de confusion. Ils réclament une Église forte, sûre de sa doctrine, enracinée dans la tradition liturgique et théologique, parlant avec autorité dans un monde instable. L’Église est vue comme une ancre ou un phare pour le monde.

Ces deux lignes ne sont pas nouvelles, mais les désaccords entre cardinaux eux-mêmes sont devenus plus visibles, parfois très vifs. Le pontificat de François, par sa liberté et ses choix pastoraux, a exacerbé ces oppositions, qui se sont parfois exprimées publiquement. Et c’est dans ce contexte que les électeurs du prochain pape vont devoir discerner. Même si de nombreux cardinaux électeurs ont été créés par le pape François lui-même, la division reste bien présente, les cardinaux ne sont pas tous les mêmes !

Le conclave : entre discernement spirituel… et manœuvres humaines

Le conclave reste un moment spirituel fort. Les cardinaux sont coupés du monde extérieur. Ils prient, échangent, votent dans le silence. Il y a une vraie volonté de se laisser guider par l’Esprit Saint, dans la profondeur et la foi, même si chacun croit savoir ce qui est bon pour l’Église.

On serait cependant naïf d’ignorer les logiques humaines à l’œuvre. Il y a des influences, des réseaux, des stratégies. Certains cherchent un pape « de continuité », d’autres « de rupture ». Certains évoquent le désir d’ « un pape normal » ! Des équilibres géopolitiques entrent aussi en jeu : Europe, Afrique, Amériques, Asie… tous ont leur mot à dire. Il y a même des rumeurs politiques : selon certains médias, Emmanuel Macron soutiendrait discrètement la candidature du cardinal Aveline. Fantasme ou réalité ? L’histoire ne le dira peut-être jamais, mais cela montre combien les enjeux sont multiples.

Car le conclave reflète les tensions de l’Église universelle. Et pourtant, c’est aussi là que Dieu agit. Il ne nie pas ces tensions. Il ne supprime pas la liberté des hommes. Mais il agit à travers elles. Le Saint-Esprit n’est pas un coup de baguette magique. Il est un souffle discret qui travaille les cœurs. En espérant que ceux-ci restent sensibles à son action…

Espérer malgré tout : l’Esprit Saint à l’œuvre

L’Église a traversé bien d’autres crises. Des papes saints, des papes fragiles, des papes inattendus ont guidé le peuple de Dieu au fil des siècles. Il ne s’agit pas de chercher un chef parfait, ni un pape qui plairait à tout le monde. Le prochain pape sera un homme avec ses limites. Mais il sera aussi un homme appelé par Dieu.

Et cela suffit à espérer.

Car Dieu se sert des chemins humains, même tortueux, pour accomplir sa volonté. Le pape François n’était pas attendu en 2013. Et pourtant, il a profondément marqué l’Église. Il a nourri une génération de croyants, certains se demandent même si l’afflux de catéchumènes n’est pas aussi le fruit de son pontificat. Son successeur, quel qu’il soit, sera un signe pour notre temps.

Alors prions dans la lumière de l’espérance. Prions pour les cardinaux. Redoublons de prière pour l’Église. Prions pour que la lumière éclaire ce moment unique. Et pour qu’au-delà des désirs humains et spirituels personnels, celui qui sera Pape continue de conduire l’Église sur les chemins de l’Évangile, selon la volonté de Dieu.

L’Esprit Saint travaille… et les hommes aussi !

Lors du conclave, tout est minutieusement encadré pour garantir le secret absolu du vote. La chapelle Sixtine est passée au crible. Depuis 2005, un brouilleur d’ondes y est installé pour empêcher toute communication. Téléphones, montres connectées, appareils électroniques sont formellement interdits dès l’entrée des cardinaux dans la résidence Sainte-Marthe. Ils sont coupés du monde.

Et le fameux signal de fumée ? Il a déjà semé la confusion dans le passé. Pour éviter tout doute, un mélange chimique est désormais utilisé afin de produire une fumée noire ou blanche bien distincte. L’Église ne plaisante pas avec le suspense !

Autre détail discret mais révélateur : lors du conclave de 2013, des ouvriers ont posé des rideaux occultants sur les fenêtres de la chapelle… pour empêcher toute tentative d’espionnage à l’aide de drones ou de caméras à longue focale.

Même si l’Esprit Saint guide les cœurs, il se sert aussi de mains humaines pour préparer l’avenir de l’Église.

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